Dépistage du Covid-19 : on vous explique pourquoi le retour à la gratuité des tests est défendu par plusieurs spécialistes
C'est une décision que le gouvernement avait prise pour inciter les Français à se faire vacciner contre le Covid-19. Depuis le 15 octobre, les tests dits "de confort" ne sont plus remboursés pour les personnes non vaccinées, sauf si elles disposent d'une prescription médicale ou si elles sont identifiées comme cas contacts. Un dépistage facturé autour de 22 euros pour un test antigénique et 44 euros pour un PCR.
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Mais face à l'arrivée en France de la cinquième vague de l'épidémie, plusieurs spécialistes appellent à revenir à la gratuité des tests pour tous. "On a lâché le dépistage et c'est une erreur", a ainsi estimé mercredi 17 novembre Gilles Pialoux, chef du service des maladies infectieuses de l'hôpital Tenon à Paris, sur BFMTV. L'idée s'est également invitée dans l'arène politique, alors que le candidat à l'élection présidentielle Jean-Luc Mélenchon a plaidé sur TF1 pour le retour au remboursement des tests. Franceinfo fait le point sur les différents arguments avancés.
1Tester davantage permettrait de mieux appréhender le rebond de l'épidémie
C'est avant tout la situation sanitaire qui est mise en avant pour défendre le retour au remboursement des tests de dépistage. A l'image de l'Allemagne, qui a rétabli leur gratuité face à une flambée des cas de contamination. "Dans une période de rebond épidémique (...), il faut pouvoir s'assurer que les personnes infectées, quel que soit leur statut vaccinal, soient détectées le plus rapidement possible", défend l'épidémiologiste Pascal Crépey dans les colonnes de L'Obs.
Or, un mois après la fin de leur gratuité, le nombre de tests a chuté. Alors que 440 000 prélèvements étaient réalisés chaque jour autour du 10 octobre, 300 000 dépistages étaient effectués quotidiennement fin octobre. Une diminution qui risque de brouiller le suivi de l'épidémie, avancent plusieurs spécialistes. "Il y a probablement une sous-estimation du nombre de cas en France", explique par exemple Mahmoud Zureik, professeur d'épidémiologie et de santé publique, à L'Express (article abonnés).
"Cela pose problème si nous sommes amenés à prendre des mesures qui se fondent sur un certain seuil de circulation, car dans ce cas, il nous faut des indicateurs fiables", poursuit-il.
Pascal Crépey fait quant à lui valoir que le dépistage massif est crucial "lors du démarrage d'une phase épidémique", quand "il y a aussi plus de personnes infectées, donc plus de cas contacts". De son côté, Gilles Pialoux ajoute qu'à l'approche de l'hiver, le dépistage est essentiel pour différencier les infections au Covid-19 de celles dues aux virus saisonniers. "Il va y avoir des gens qui vont avoir plein de symptômes qui ressemblent à un Covid bénin et ne vont pas se faire dépister", souffle le chef du service des maladies infectieuses de l'hôpital Tenon.
2Avec les tests payants, le délai entre l'apparition des symptômes et le dépistage s'allonge
Par ailleurs, la fin de la gratuité des tests semble avoir creusé l'écart entre l'apparition des premiers symptômes et la date du prélèvement. Ce délai est désormais de 2,5 jours, "soit la plus haute valeur moyenne observée en 2021", pointe Santé publique France dans son dernier bulletin des activités de traçage.
"Cette augmentation [du délai] pourrait s'expliquer par le passage nécessaire chez un médecin prescripteur préalable au test pour les personnes non vaccinées", avance SPF. Pascal Crépey évoque également ceux qui "décident d'attendre, pour voir si les symptômes persistent avant de payer pour se faire tester" ou "les asymptomatiques, qui auraient pu se faire tester si cela avait toujours été gratuit, mais qui ne le feront pas car c'est payant".
Or, il est important que ce délai reste "le plus court possible" pour limiter la propagation du virus et assurer un isolement rapide des cas positifs et des cas contacts, ajoute Santé publique France.
"Ne pas avoir un accès rapide aux tests pourrait être préjudiciable, car si vous avez des symptômes ou si vous êtes cas contact et que vous devez passer par une prescription médicale pour pouvoir faire ce test, cela retarde le diagnostic, la prise en charge, et tout cela amène aussi à propager le virus", résume Mahmoud Zureik. "C'est un outil de plus pour détecter plus tôt, pour isoler, abonde Gilles Pialoux. Quelqu'un qui se sait positif n'a pas le même comportement, c'est humain. Il s'isole, il prend des mesures."
3Les tests payants ne semblent pas avoir convaincu les réticents à la vaccination
Enfin, "utiliser le déremboursement des tests avait du sens politiquement pour forcer encore un peu plus les non-vaccinés à le devenir", expose Pascal Crepey auprès du Parisien. Mais l'objectif est encore loin d'avoir été atteint. Le nombre de primo-injections n'a pas connu de rebond depuis la fin de la gratuité des tests. Environ 17 000 premières doses de vaccin sont désormais administrées quotidiennement, bien loin des 350 000 injections réalisées début août, au plus fort de la campagne.
Pas question cependant pour le gouvernement de changer sa stratégie. "Une grande majorité des Français ont accès aux tests, qui restent pris en charge par la Sécurité sociale pour les personnes qui sont vaccinées, qui sont cas contacts de cas positifs et pour les personnes qui ont une prescription médicale, ce qui est quand même assez large", a plaidé le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, mardi, sur France Inter. Et de trancher jeudi matin sur le plateau de LCI : "Il n'est pas prévu aujourd'hui" de revenir à la gratuité des tests.
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