OL, OM, Aulas : "On ne veut pas payer pour d'autres"
Au lendemain de l'incident qui a provoqué l'arrêt de la rencontre entre l'OL et l'OM, Jean-Michel Aulas est revenu pour quelques médias, dont O&L, sur le déroulé de la soirée, mais également sur les possibles sanctions à venir pour le club. Le patron de l'Olympique lyonnais ne veut pas "payer pour d'autres".
Qui a demandé au speaker d'annoncer la reprise du match ?
Jean-Michel Aulas : "La personne qui a donné la consigne à l'organisateur, Xavier Pierrot, est le superviseur des délégués qui était présent. Cela a fait l'objet d'une consignation par Xavier. Elle a été répercutée dans les termes qui ont été donnés, à savoir la reprise à la condition qu'il n'y est pas d'autres incidents, ce qui a été expliqué par le speaker."
Pourquoi l'arbitre a-t-il changé sa décision ?
"C'est complexe, mais cela est arrivé dans un moment de tension très fort. Je n'ai pas participé au début de la réunion, qui s'est déroulée dans le pôle de sécurité, je suis arrivé au bout de 20 minutes car je pensais que ma présence n'était pas nécessaire. M. Buquet a dès le début essayé de protéger la santé des joueurs, ce qui est normal. Il était affecté par la blessure de Dimitri Payet. Il a donné dès le début, du moins c'est ce qui m'est rapporté, l'impression qu'il était plutôt favorable à arrêter. Ensuite, tout le monde est intervenu et les dirigeants marseillais ont été très courtois. Il y a eu des échanges, le préfet et le DDSP (direction départementale de la sécurité publique) ont indiqué que évacuer 56 000 personnes, c'était peut-être un peu compliqué. Les discussions et réflexions se sont poursuivies avec notamment Xavier Pierrot et Vincent Ponsot qui représentaient le club. M. Buquet a dit qu'on allait reprendre et qu'il allait donner les modalités aux capitaines et aux entraîneurs dans son vestiaire. Ils ont donc été reçus par le corps arbitral et les deux délégués. A ce moment-là, l'arbitre a annoncé la reprise et les modalités, c'est à dire 10 minutes, dont 7 d'échauffement et 3 consacrées à la remise en ordre des esprits de tout le monde."
Au même moment, il y a visiblement eu des échanges extérieurs puisque quelque temps après le superviseur des délégués, après avoir donné la décision de reprise, est revenu pour dire que M. Buquet voulait voir les deux présidents et le préfet. Dans le vestiaire, l'arbitre a indiqué qu'il souhaitait que la rencontre soit interrompue, en rappelant qu'il avait déjà émis cette hypothèse lors de la première réunion. Le préfet a été surpris et lui a reproché d'avoir fait pendant une heure la première réunion pour finalement changer d'avis. J'ai de mon côté posé la question ensuite à M. Buquet pour savoir qu'elle était ses motivations pour changer d'avis. Il n'y a pas eu une réponse vraiment précise, il a laissé penser que c'était sa conviction intime depuis le début."
"La décision a été prise beaucoup trop longtemps après les incidents"
L'attente autour de la décision de reprendre ou non le match
"La décision a été prise beaucoup trop longtemps après les incidents. On ne doit pas attendre 1h ou 1h30 pour choisir si on reprend ou si on arrête, et sur ce point-là, je rejoins la Ligue et les présentateurs. Mais entretemps, je pense qu'il y a eu un certain nombre d'interventions extérieures, même si comme je n'y étais pas, je ne pas dire exactement ce qui s'est passé. Je sais en revanche qu'on a vu débarquer certains joueurs marseillais, en particulier un Argentin (Espagnol, il s'agissait d'Álvaro González) qui a tapé sur la porte et crié des insultes. Steve Mandanda, qui a toujours été d'une correction exemplaire puisqu'il remplaçait Dimitri, a pris acte de la décision. Les Phocéens sont venus réclamer que Ruddy Buquet aille voir Payet avant de faire reprendre le match. C'est ce qui a créé les incidents et probablement changer le sens de l'histoire."
Le match OM - OL en septembre 2015
"Il n'y a pas eu de diatribes comme cela fut le cas peut-être il y a quelques années au moment du retour de Mathieu Valbuena à Marseille, où cette fois-ci, ce n'était pas des bouteilles en plastique, mais des canettes de bière. C'était d'ailleurs déjà M. Buquet l'arbitre, donc il connaissait les enjeux puisque le préfet de police à l'époque avait imposé de reprendre le match pour éviter un certain nombre d'incidents."
"C'est une mesure que bien sûr on va accepter"
La sanction de huis clos général à titre conservatoire
"Je pense qu'à partir du moment où il y a eu un incident qu'on ne peut pas nier, la Ligue est tout à fait en droit, surtout suite à l'intervention surréaliste de madame la ministre des Sports (Roxana Maracineanu), de prendre, au moins pour la forme, une décision de principe. Celle-ci marque les esprits, va nous pénaliser. Mais en me mettant à la place de la LFP et sous la pression des événements, c'est une mesure que bien sûr on va accepter. Elle était malheureusement prévisible dans le contexte médiatique qui est le nôtre. Je voulais rappeler que nous sommes ici dans le cadre d'un souci grave, on s'en est excusé et on assume notre responsabilité, mais qui concerne un individu qui a été interpelé, sans qu'il y ait eu envahissement de terrain. L'individu est directement montré du doigt par les groupes de supporteurs qui condamnent cet acte. A partir de là, on va attendre les décisions de la justice.
Il faut savoir que lorsque la Ligue se bat contre le ministère de la Justice et celui des Sports pour essayer de faire appliquer un certain nombre de décisions sur la voie publique, nous sommes ici à peu près dans le même cas et compte tenu des installations extrêmement sophistiquées de l'OL, notamment en matière de vidéo et de caméras, on a pris sur le fait l'individu. C'est à la justice de sanctionner. On a proposé de manière très claire de le radier à vie, mais on n'a pas le droit de le faire. Donc puisqu'on nous donne des leçons de l'extérieur, et mardi je serai place Beauvau (ministère de l’Intérieur) pour expliquer aussi que nous appliquons les règles, les consignes, c'est maintenant à la justice d'intervenir. Que la Ligue suspende, en attendant l'instruction, l'intégralité du stade, ce n'est pas économiquement totalement justifié, mais on admet complètement, contenu de l'impact qu'il faut donner à cette affaire-là, et surtout des mesures qu'il faut trouver pour que le football retrouve cette forme de sérénité. Mais il ne faudra pas faire d'amalgames car ce qui s'est passé dimanche n'a rien à voir avec les envahissements de terrain ou les bagarres entre supporteurs."
Faut-il enlever des points à l'OL ?
"Je pense qu'il faut être de mauvaise foi pour comparer les événements de Nice - Marseille, de Montpellier - OM ou de Lens - Lille parce qu'on est dans des envahissements de terrain et des bagarres. Un certain nombre d'entraîneurs et d'adjoints sont allés faire la police eux-mêmes. Je reste favorable au fait qu'il y ait des sanctions sévères, y compris en matière de points, car c'est la seule décision qui peut faire arrêter les groupes de supporteurs [...] Oui, on peut être pour des sanctions drastiques, et en particulier enlever des points lorsqu'il y a des envahissements de terrain et des bagarres. Est-ce que nous méritons d'avoir un point en moins, je n'en suis pas certain. Maintenant, si ça permet de faire progresser l'ensemble de la jurisprudence en matière de sécurité... mais alors il va falloir regarder ce qui s'est passé depuis le début de la saison, et ce n'est pas un point qu'il faudra retirer aux auteurs d'un certain nombre d'actes qui sont totalement différents de ceux de dimanche."
"On va défendre une plus grande rigueur de la part des instances"
Craignez-vous une lourde sanction ?
"Je ne sais pas ce qui vous entendez par sanction lourde, mais elle est déjà immense quand cela arrive sur une télévision comme Amazon, le dimanche soir, pour une rencontre qui doit être le sommet du championnat, évidemment que l'on craint des sanctions. Mon rôle est de dire la vérité et depuis dimanche, elle n'a pas été dite, et d'ailleurs, je porterai plainte contre ceux qui ont dit des choses inexactes et qui ont été facilement vérifiées, avec notamment le communiqué de la Préfecture. On va défendre une plus grande rigueur de la part des instances, mais on ne veut pas payer pour d'autres. S'il doit avoir une sanction forte contre l'OL, il faudra que rétroactivement, il y en ait des cohérentes à l'image de celles qui nous seront appliquées. S'il y avait eu des antécédents à Lyon, on l'aurait su et on aurait été éventuellement sanctionnés d'un sursis, ce qui n'est pas le cas puisque c'est la première fois."
Quid de la rencontre OL - OM ?
"Je n'imagine pas qu'on ne rejoue pas cette rencontre, regardez ce qu'il s'est passé à Nice. Le match a été rejoué sur terrain neutre."
Qu'allez-vous faire pour le public
"Il faut attendre les décisions pour trouver des solutions adaptées à la nouvelle configuration. Mais on sera comme toujours à l'écoute des gens qui ont bien voulu s'acquitter de sommes parfois conséquentes car les tarifs étaient élevés pour ce match de gala."
"On a la possibilité de mettre des filets aux virages"
Est-il évoqué l'idée d'installer des filets ?
"Bien sûr. On avait d'ailleurs à un moment donné, à la suite du fameux match de coupe d'Europe, un certain nombre de filets, mais dans les négociations avec les groupes de supporteurs, on les avait enlevés, car ils sont responsables. On a la possibilité d'en mettre aux virages. Je rappelle que pendant la première réunion, il a été demandé par Ruddy Buquet de mettre 4 boucliers dans chacun des coins, ce qu'on a fait."
Vincent Labrune a déclaré qu'il fallait "renverser la table", pensez-vous que tout le monde doit tirer dans le même sens sur ces problématiques concernant les supporteurs ?
"Je suis complétement solidaire de Vincent sur ce sujet-là. Si on doit renverser la table, il faut que tout le monde le fasse, par équité et jurisprudence. Mais je suis d'accord sur le fait que ça ne doit plus se renouveler. On sait bien qu'entre les idées qui peuvent mûrir un soir de catastrophe et la réalité de tous les jours, il y a un grand pas. Je ne pense pas que ça soit dans l'intérêt de la Ligue d'arrêter tous les matches.
Le communiqué de la LFP
"Il y a probablement eu un contact entre la Ligue et les gens qui participaient. Ce n'est pas l'OL car par défaut, ça n'avait aucun intérêt, donc je vous laisse imaginer qui a pu partager une information qui est fausse."
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